Une traversée en haute mer
Extrait de « Une chance sur un Milliard » – Gilles Legardinier
Il a comparé la vie à une traversée en haute mer. Selon lui, on nait au large, dans la soute d’un bateau dont on est pas le capitaine. Durant l’enfance, on est à l’abri. On explore les niveaux intérieurs, au chaud, en remontant peu à peu vers le pont supérieur. Puis un beau jour, quand on est assez grand pour voir au-delà du bastingage, on découvre l’horizon.
Bien qu’incapable de tenir une boussole, on est tout à coup ébloui. On finit par se lasser du rafiot et on embarque sur le premier canot disponible.
Capitaine d’une coque de noix ballottée par les flots mais capitaine quand même ! On navigue au gré des vents et très vite, la faim se fait sentir. Tout l’enjeu consiste alors à rallier un port en trouvant un équipage.
Parfois, on échoue sur une ile avec d’autres naufragés. On s’épuise à essayer de suivre le sillage des grands marins, on dérive, on croise des requins, on pêche des sirènes ou des morues, mais ce que l’on désire de plus en plus, c’est la terre ferme et stable. Car n’oublie jamais que le meilleur moyen de combattre le mal de mer, c’est de s’asseoir sous un chêne ! Mais [il] m’avait prévenu. Même si tu as peur, m’a-t-il-dit, ne te presse pas. Parce qu’une fois amarré au port, tout ce que tu feras, c’est rêver du grand large, de l’époque où tu étais perdu et où tu croyais que tu allais te noyer. Les hommes sont ainsi, à vouloir leur corps assis au coin du feu mais leur esprit lancé dans une éternelle aventure. »
[…] Ne rame pas trop vite vers la berge, petit. Ce sont les tourments qui nous donnent les meilleures raisons de tenir. Profite du soleil comme des tempêtes, célèbre les aubes, accepte les crépuscules, et surtout fais attention à ce que tu pêches.